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| ce n est pas moi qui clame (par tof) | |
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+8Polip CéLine Thea slippeur Dune krys la bête curieuse Admin 12 participants | |
Auteur | Message |
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CéLine Modératrice
Nombre de messages : 484 Age : 51 Date d'inscription : 26/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Ven 13 Jan - 12:33 | |
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| | | Thea
Nombre de messages : 564 Date d'inscription : 26/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Jan - 12:11 | |
| merci Celine vais essayer d y aller | |
| | | krys
Nombre de messages : 1006 Localisation : Fermons-les-clans Date d'inscription : 27/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Dim 7 Mai - 16:38 | |
| http://www.romain-humeau.com/forum/detail.php?forumid=1&id=1077&page=8
Atilla Joszef par Dennis Lavant et Serge Teyssot-Gay.
Lundi 12 Decembre 2005, 19:00 Comédie de Reims - Reims Vendredi 10 Fevrier 2006, 19:30 Théâtre National du Luxembourg - Luxembourg Jeudi 15 Juin 2006, 20:00 L'Aéronef de Lille - Euralille Vendredi 21 Juillet 2006 - Cabaret Breton (Festival des Vieilles Charues)
Et le sud ? | |
| | | krys
Nombre de messages : 1006 Localisation : Fermons-les-clans Date d'inscription : 27/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Dim 6 Aoû - 2:29 | |
| http://www.cinquiemenuit.fr/index.php3?voir=teyssotgaylavant&image=7
Des photos du cabaret breton | |
| | | Dune
Nombre de messages : 787 Date d'inscription : 26/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Jeu 10 Aoû - 18:49 | |
| - CéLine a écrit:
- http://aiwadirocklehub.free.fr/ <- c'est là que tout est expliqué pour le hub
Je n'arrive pas à accéder à DC++ Cela m'affiche une page d'erreur. C'est moi ? | |
| | | CéLine Modératrice
Nombre de messages : 484 Age : 51 Date d'inscription : 26/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Jeu 10 Aoû - 20:54 | |
| je viens de tester, je me suis conenctée sans problème. Ca t'affiche quoi comme message d'erreur ? Re-essayes quand même, en message d'accueil sur le hub, obélixe a marqué : - Citation :
- Si ça merde en ce moment, dites merci a mon FAI
Veuillez m'excuser pour cette période de troubles.... donc tu est peut etre tout simplement mal tombé | |
| | | Dune
Nombre de messages : 787 Date d'inscription : 26/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Ven 11 Aoû - 3:47 | |
| An error has been encountered in accessing this page. ... et patati, et patata... Ca fait ça au moment où j'essaie de télécharger DC++ à partir du site. Je retenterai le coup dans quelques temps. Merci Céline ! | |
| | | CéLine Modératrice
Nombre de messages : 484 Age : 51 Date d'inscription : 26/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Ven 11 Aoû - 5:45 | |
| Ah non le message d'Obé, concerne ceux qui ayant deja telechargé DC n'arrive pas a se connecter sur le hub. Pour toi, le probleme est plus en amont. peut ete tout simplement que depuis le temps qu'elle a ete indiqué, l'adresse de telechargement de DC n'est plus correcte. Faudrait que je me renseigne mais je ne promet pas d'avoir le temps vu que je pars samedi et que mes sacs sont pas du tout, mais pas du tout pret. Au pire, je verrai ca a mon retour dans une semaine. Bissesssssssssss | |
| | | krys
Nombre de messages : 1006 Localisation : Fermons-les-clans Date d'inscription : 27/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Ven 11 Aoû - 6:45 | |
| Essaye là http://belnet.dl.sourceforge.net/sourceforge/dcplusplus/DCPlusPlus-0.691.exe | |
| | | Dune
Nombre de messages : 787 Date d'inscription : 26/09/2005
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Ven 11 Aoû - 18:31 | |
| Merci Krys Mais, rien à faire... (faut dire que je ne suis pas très douée à ces jeux là ) | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 0:37 | |
| Qu’est ce que je sais de ce poète-là. Sauf qu’il avait le verbe bref, et qu’il s’appelait Attila Attila Joszef
En ancienne Transylvanie un pauvre jour il naquit Son père étais déjà parti L’amour etait bref
Pauvre magyar t’aurais voulu valider… _Enregistré à la comédie de Reims, le douze décembre 2005, dans le cadre du festival « à scène ouverte » : Attila Joszef _ Attila Joszef _…Ses deux petites sœurs et sa mère… _ Poèmes choisis et mis en voix par Kristina Radi, mise en lumière par yves (..) avec Denis Lavant et Serge Teyssot-Gay à la guitare. Avec les voix hongroises de Zolt Nagy et Kristina Radi une chanson de Dick Annegarn. Et la voix de bertrand cantat. Attila joseph 1905-1937 Biographie en quelques mots par Jean-Pierre Sicre. _On a affaire à un poète qui est… qui est vraiment connu dans le monde entier et très peu en France. C’est d’autant plus étrange, qu’il a été traduit en France très très tôt. Et par d… des très grands noms. Par Guiluvic, par Cocteau, par Eluard… Venu au monde dans les pires conditions. Le père s’en va… Jamais eu de père vraiment. La mère est une espèce de blanchisseuse qui travaille pour les riches et qu’a... et qui a même pas vraiment de métier. Y a pas un rond pour manger à la maison. Il a deux sœurs aînées. Et il connaît pas l’école. Alors que ça sera… Il est connu de tous les hongrois comme étant un puits d’érudition. Comment lui est venue cette érudition ? Il commence par travailler dans les rues par… par vendre des cornets de sucreries dans le cinéma, il onze ans. A onze ans il écrit son premier poème. Et…heu… sa mère arrive tellement peu à nourrir sa petite famille. Qu’on le prête à une famille de ploucs. Une sorte de truc d’assistanat social. Donc on le … j’dis pas qu’on le vend. Mais on le loue à des paysans. Il va détester la campagne. Et mmm, il revient à Budapest. Avec une espèce de … de fringale d’apprendre. Et il … il suit l’école à sa façon. Il pique des livres dans des librairies, il est un peu voleur. Et il vole. De toute façon on n’a pas d’argent. Il fait froid en Hongrie, l’hiver. Pour faire brûler le poêle, donc il va voler dans les gares de marchandise le bois qu’est là et qui dort. Et c’est comme ça qu’il fait ses classes. Et puis sa mère meurt quand il a quatorze… quinze ans. Et là, il est seul au monde. Ses sœurs aînées s’occupent un peu de lui, mais … Il va… Il a du pot : c’est une sœur qui vient de se marier avec un avocat qui va le prendre en affection et qui lui dit « j’ai des bouquins chez moi viens lire, et viens »… Il va passer son bac tout seul sans être allé à l’école. Brillamment. On a affaire d’évidence, c’est clair, à un sujet brillantissime. On lui dit « Va pendant un an essayer de faire les trois classes » et il est le premier aux examens. Donc une sorte de surdoué un peu inquiétant, un peu… Il a été élevé quand même dans les rues avec les chenapans. Bon le suicide l’accompagne toute la vie. Première tentative a neuf ans. Il a en a eut quatre ou cinq, des tentatives. Très rocambolesques. Un jour, il vide une pharmacie de médicament et on arrive le sauver, une autre fois son suicide raté le plus sensationnel. (Vous savez que la Hongrie a toujours occupé la place numéro un en Europe dans les statistiques du suicide. C’est un des… Les hongrois ont quelques spécialités la musique, les larmes, on pleure énormément en Hongrie, surtout quand on a bu ; et le suicide.) Un jour Attila il a vingt ans, il en peut plus il se met la tête sur le rail il attend le train, une minute, deux minutes, dix minutes… Tout d’un coup il entend des pas. Quelqu’un lui tape sur l’épaule en disant « te casse pas. Le train ne viendra pas aujourd’hui il y un type qui s’est suicidé un kilomètre plus tôt. Donc tu as raté ton coup. Voilà ». La dernière fois il ne ratera pas. Donc, Un gamin qui se trouve avant vingt ans jeune bachelier. Il va essayer de fréquenter l’université, mais il commence déjà à publier des poèmes. Et ses poèmes sont tellement mal pris, qu’y en a un qui tape dans l’œil de l’un de ses profs… C’est la Hongrie des années 20… La Hongrie des années 20 c’est une espèce d’ordre morale un peu… Une espèce de franquisme, on va dire. L’amiral Orti qui n’est pas vraiment un dictateur. Une sorte de dictature un peu mole à la Salazar ou à la Franco. Mais une dictature assez lourde et mauvaise quand même. Et donc surtout avec une énorme présence de la soutane. Pays très catholique. Et la pesanteur de la religion etait vraiment énorme à l’époque. Et Attila, athée… C’est un athée, cela dit Dieu est partout dans son œuvre. D’ailleurs, je remarque le livre vient de sortir. Les lecteurs catholiques sont fascinés. Mais Y a beaucoup de blasphèmes, des blasphèmes, je dirais théologiquement habités. Et donc il n’a pas vingt ans quand un de ses poèmes est choppé par la justice. Et on demande au poète de comparaître devant le tribunal, et ils voient arriver : un gamin ! Et ce gamin il n’a rien pour se défendre devant le tribunal. Il dit « oui j’ai écrit ce poème, je ne le renie pas. D’ailleurs, on le trouve très bien. Beaucoup de critiques le trouvent admirable. » Alors on le relaxe. Faute de … Ca gène un peu quand même ces juges barbus de condamner un type qui a l’âge de traîner ses culottes courtes sur le banc de l’école. Cela dit, son prof se démerde. Et lui fait comprendre que l’université c’est fini pour lui. Il comprend vite. Il claque la porte de l’université. Et il se retrouve alors… Là, de nouveau petit boulot, petit métier : Débardeur sur le Danube. Et… Il y a une partie des hongrois à l’époque, qui ne supportant pas cette fameuse pesanteur quasi dictatoriale dont je parlais il y a un instant. Qui se sont exilés. Ils se sont exilés à Vienne. Et... il a un copain qui lui dit « Mais, viens, viens ! C’est... on est beaucoup plus libre. C’est pas très loin… » Il va a Vienne. Et de là, il se dit « mais la porte du monde m’est ouverte » Il a un peu fréquenté les langues étrangères. Alors forcément, il parle allemand parce que tout le monde a Budapest parle allemand, en dehors du hongrois. Et la France l’intéresse. Il va s’arranger pour passer une année… Une bonne année entière à paris où il arrive vraiment sans un … sans un radis. Il va crever de faim à Paris. Il y a d’ailleurs des poèmes formidables sur la dèche à Paris. Et à cette époque là, il est véritablement anar jusqu’au fond des voiles. C’est a d… y a un poème que nous n’avons pas mis dans le livre, et qui vient d’être découvert… Un poème écrit en français. Et un ... Il y a deux poèmes, un en français, un en hongrois. Mais qui sont tous influencés par son nouveau maître. Qu’est-ce qu’il fait à Paris ? Il découvre Villon. Et il devient à partir de là, le Villon moderne. C’est à dire quelqu’un qui n’est pas évidemment du coté de la vertu irréprochable. Mais surtout je dirais quelqu’un qui ... qui fait danser les mots d’une manière... sans aucun apprêt, mais avec la musique des rues. Et ça, ça l’accompagnera jusqu’au bout. Je dirais que son voyage à Paris lui a visiblement donné le La de sa musique. Son génie etait là il n’y a qu’à lire les poèmes qu’il écrivait à quinze ans… seize ans. Tout Attila Jozsef était déjà là, mais il y a une musique en plus, qui va arriver. Qui arrive pendant le voyage en France. Il rentre et il tombe beaucoup amoureux. Je m’étends pas là dessus. Mais … ça fait… c’est un... c’est une chose… Son premier poème, c’est celui d’un gamin, dont on parlait... Quand il écrit à onze ans, c’est un poème sur la faim. Y qu’à lire Villon pour savoir que la dèche et la faim sont au centre de la poésie de François Villon. Et au centre aussi de la poésie d’Attila Jozsef. Il imagine une énorme oie rôtie. L’oie c’est vraiment Le gueuleton parfait pour le hongrois. Et il l’imagine pour lui tout seul... Une oie entière… Et c’est un homme à appétit. Il ne peut pas voir une fille un peu gironde sans tomber immédiatement et totalement amoureux. Comme si c’etait l’oie rôtie de sa vie. Il tombe amoureux d’une belle bourgeoise intelligente, qui est jeune… Ils ont vingt ans, guère plus… Qui fait des études, de bonne famille. On le présente aux parents. Simplement c’est pas le fiancé idéal. Bien sur, il a écrit quelques plaquettes de poésie, qui ont eut un petit retentissement. Et… il comprend qu’il va devoir travailler... et peut-être même mettre une cravate. Enfin ... il est prêt. Il est prêt à faire ça. Ils se séparent… On les sépare. On les fiance à moitié. Elle, elle va en Angleterre faire des études, un peu poussées, pendant l’année... Dès qu’elle a le dos tourné, évidemment, il la trompe à tour de bras et c’est rompu. Ca sera un peu comme ça tout le temps. Il se retrouve donc dans ce Budapest qui a changé depuis son voyage en France et puis, cette menace d’un mariage, d’une vie professionnelle un peu normalisée l’ont mûrit. Il sait. Il a compris qu’il n’était pas fait pour ça. Ca a été une tentation qu’il a relativement surmontée. Il restera d’ailleurs très très copain avec cette ancienne fiancée jusqu’au bout. Et il est dans un Budapest où les choses ne s’arrangent pas. C’est à dire que la dictature d’année en année, dans les années vingt, et même dans les années trente, se durcit. N’oubliez pas que bientôt il y aura l’Allemagne nazi à l’horizon. Et que les hongrois pour être tranquilles doivent dégager Hitler. On en est pas encore tout à fait là, mais… Il sent bien qu’il y a quelque chose... Il devient… Il se politise à cette époque-là. Il se politise si bien qu’il en vient à participer à des réunions clandestines du parti communiste. Le parti communiste à l’époque en Hongrie, il est interdit. Si vous êtes choppé comme communiste, on vous fout en taule immédiatement. C’est un parti évidement lié totalement à Moscou, inféodé au Camarade Staline. C’est un parti de staliniens purs et durs. Koestler qui est un grand ami d’Attila Josef, est à ce moment-là le prince dans les coulisses, hein ?.. .Koestler est recherché, c’est l’homme de Moscou en Hongrie. Tous ces gens, tous ces grands intellectuels communistes hongrois seront ses amis. Heu… On sait pas si Attila a vraiment adhéré au parti communiste, on vient de parler de ses fiançailles… heu… charnelles. Ca c’est les fiançailles avec le parti qui sont aussi très charnelles parce que… Y a une nana dans le parti qui l’intéresse beaucoup il va vivre avec elle une passionaria. Et heu il distribue des tracts il prend des risques… Souvent c’est les copains qui faut aller voir en prison, notamment François Faïte, on en parlait l’autre jour. Attila venait pendant que lui était en taule. Attila a évité la taule mais. Au bout d’un moment quand même, Dans les réunions avec les frê… avec les camarades, On a du mal a le supporter parce qu’il est... il arrive pas a être communiste. Si j’insiste temps sur ce petit épisode communiste. C’est qu’Attila va mourir en trente sept, à l’âge de trente deux ans. Mais qu’après la guerre, quand même, les communistes prennent le pouvoir. Un dizaine d’année après sa mort, ils s’installent, et on va le repêcher. On va en faire Le communiste exemplaire, alors qu’il n’a jamais cessé de se chamailler et qu’à partir de trente trois, c’est une rupture assez violente. Il écrit contre les communistes, il les assimile aux nazis. Et on en fera, après la guerre, ça c’est … vous connaissez les tours de passe-passe de l’histoire… Le pauvre, il a dû se retourner dans sa tombe… on en fera…y aura des lycées Attila Jozsef partout, des coopératives agricole Attila Joseph… le grand cirque. Le grand cirque rouge… Simplement ces fiançailles ratées à répétition, avec les jeunes filles, avec le parti, minent quelque chose en lui… On a dit qu’il avait toujours été fragile. Il tenta le suicide à neuf ans, le fait d’être abandonné par sa mère qui l’adorait pourtant. Elle l’a fait par nécessité. C’est... On sent bien qu’il y a… C’est un battant. C’est un type qui est très fier de son prénom. C’est le prénom de quelqu’un qui a mis à feu et à sang la moitié du monde. Cela dit, c’est un type fragile et il le sait bien. Et heu… dès la rupture, commence une grande déprime. Qui va durer, avec des hauts et des bas, biens sûr... jusqu'à la fin. Il entreprend une psychanalyse. Chez lui il y a quand même deux divinités tutélaires. Il a lu tout Marx, mais il a lu aussi tout Freud. Et il a été très certainement un des premiers. N’oubliez pas. Qu’à l’époque qui est la sienne, il y a deux capitales de la psychanalyse. Tout le monde dit Vienne : non ! Il y a Vienne et Budapest qui sont a égalité Freud a Vienne, et son disciple préfère Enzci qui est vraiment d’un niveau égal à Freud, c’est un très grand, à Budapest. Et Attila baigne dans ces eaux là. Il est fasciné par Freud. Il entreprend une première psychanalyse. Et son analyste à l’intelligence, il s’appelais Rapapor., il a l’intelligence de voir qu’il ne peut pas... d’abord c’est un patient pas commode. C’est vrai, c’est embêtant toujours pour un analyste d’avoir sur son divan quelqu’un qui connaît Freud aussi bien que lui et qui a réponse à tout. C’est très difficile de conduire une bonne analyse dans ces conditions là. Il y a de telles défenses. Et Rapapor comprends qu’en fait Attila est profondément ce qu’on appelle un mélancolique. Alors, Il a fréquenté dans la dernière saison de sa vie un institut psychiatrique. Ces tentatives de suicides… Qu’elle est sa folie ? Alors, à l’époque, on disait schizophrénie. Tout… dès que vous aviez un bobo mental vous étiez schizophrène. C’était la maladie à la mode, la maladie de cette partie là du siècle. Donc on l’a catégorisé schizophrène, y a rien… vraiment vous pouvez regarder sa poésie à la loupe. Il n’y a rien de schizophrène, de schizo dans cette poésie. C’est ... il est proprement et très précisément un cas clinique exemplaire de ce que l’on appelle un mélancolique. Alors il y a la mélancolie, tous les gens pensent à Duhrer, à une espèce d’attitude ombrageuse devant le monde. La mélancolie clinique n’est pas du tout çà. Le mélancolique est quelqu’un qui se vit comme quelqu’un un deuil. Lui se vit en deuil de sa mère. Il s’est servit de la mort de sa mère pour habiter une noirceur qu’il s’était fabriquée, parce qu’au fond cette noirceur le défendait du monde. C’est sa maladie. Et un jour, où il va bien. Il est chez ses sœurs qui ont une petite pension de famille sur le lac Ballatone et un soir, il est la. Il y a un des enfants de sœur qui est un petit gamin qui joue. Il est d’assez bonne humeur. Il dit, c’est mois de décembre, la nuit est déjà tombée « Je vais faire un tour dehors avant de dîner, laissez la porte ouverte pour quand je rentrerai » C’est les dernier mots, qu’on a entendus de lui. Il va à la gare. Une petite gare. Il y a un train qui est arrêté. Sur le rail… il met sa tête sur le rail, contre la roue et sa main droite la main qui a tenu le stylo. Et le train part. Et Attila Jozsef meurt ce soir là. _Il a quitté le parti qui ne l’a pas accepté Il a pris part et parti pour l’éternité
Il a quitté la maison pour faire un tour pour toujours Il a quitté le perron aller sans retour
Pauvre magyar t’aurais voulu valider ton histoire tu n’aurais pas mieux fait.
Qu’est ce que je sais de ce poète-là. Sauf qu’il avait le verbe bref, et qu’il s’appelait Attila Attila Joszef
Dernière édition par le Sam 14 Oct - 0:59, édité 2 fois | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 0:45 | |
| (17 ‘)
_Attila Joszef
Crois moi. Je t’aime beaucoup, cela je l’ai appris encore de feu ma mère, cet ange de bonté
Vois-tu. Elle m’a mis au monde. On a beau comparer la vie à une botte ou à un atelier de teinture, C’est tout de même autrement qu’elle nous passionne.
Trois fois par jour il change le monde Pourtant incapable d’allumer une allumette si cela dure je me passerai de leur compagnie. Qu’il serait bon d’avoir un billet et de se rendre chez soi-même Qu’il habite en vous c’est certain.
Chaque matin je baigne en eaux froides mes pensées ainsi seront-elles plus fraîches et saines. A même le diamant il pousse de bon champs bien chaud si nous les plantons, sous notre cœur
il s’en trouve qui même à cheval en voiture ou en avion sont à pied alors que moi je me prélasse. Couché dans le chant matinal des alouettes Et pourtant j’ai franchi l’abîme.
Notre âme véritable, tout comme les habits de fêtes gardons la avec soin Qu’elle demeure propre pour les fêtes.
Dernière édition par le Sam 14 Oct - 0:55, édité 1 fois | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 0:47 | |
| 19’……..
J’étais assis sur une pierre en bas du quai je regardais les peaux de pastèque flotter songeant à ma vie à peine je remarquais la surface en rumeur et le fond s’y muait (si muet) comme si en mon cœur il frayait son passage le Danube coulait, immense, trouble et sage.
Pareil au muscle lourd d’un homme travaillant soit qu’il pèche, ou qu’il lime ou brasse, ou qu’il forge. Chaque remous des flots, le moindre mouvement craquait, se relâchait, tendu semblait se tordre.
L’eau me berçait comme ma mère et racontait des histoires tout en décrassant la cité il se mit à tomber quelques gouttes de pluie puis comme c’etait égal cela cessa.
Mais pareil à celui qui de sa grotte épie la longue averse, mon œil allait au delà. Comme une pluie éternelle. Insensible et gris, je vois choir le passé, Le brillant jadis.
Le Danube coulait simplement enfant au sein de la mer féconde dont la pensée divaguerait un instant jouait et folâtrait, me souriant les ondes.
Au fil du temps allait frémissant comme des cimetières au tombeau chancelant Je suis ainsi fait que je regarde depuis de millénaire ce dont tout à coup je m’aperçois
Un instant et le temps retrouve sa forme plénière que des milliers d’ancêtres contemplent avec moi Je vois ce qu’ils n’ont guère vu, car ils labouraient la terre, S’entretuaient et s’enlaçaient faisaient ce qu’il fallait ils voient eux, plongés dans la matière ce que je ne vois point. S’il faut avouer ce qui est.
Nous nous connaissons comme plaisir et peine. J’ai le passé et eux détiennent le présent. Avec eux je tiens mon crayon nous composons un poème et je les ressens me souvenant.
Ma mère fut KOUMANE mon père SICOUL à moitié ou roumain tout à fait peut être qui sait ?
Pris de la bouche de mère doux fut le manger De la bouche de mon père Beau fut le vrai
Lorsque je m’émeus ils s’étreignent en moi je m’en attriste parfois C’est le dépérissement ce dont je me compose « Tu verras m’interpellent-ils Quand nous ne seront plus là.. » Ils m’interpellent car à présent je les suis déjà. Ces ombres en ma faiblesse ainsi suis-je fort avec eux moi quoi me souviens être davantage que le grand nombre. Etant jusqu’ la cellule primitive tous les aïeux je suis l’aïeul même qui se partage pour se multiplier d’amour. Bien heureux je deviens mon père et ma mère, aimé et mes parents se scindent eux même, à leur tour afin que je puisse me reproduire en un seul, animé. Je suis le monde : tout ce qui fut, ce qui est là les nombreux lignages qui s’affrontent les conquérants du pays natal, morts, triomphent en moi. Et la peine des vaincus me tourmente. Arpad, et Zalan, Verboczi et Dozsa, Turc, Tatars, Slovaques et Roumains, tournoient en ce cœur qui doit ce passé déjà un avenir aimable : Magyar d’à présent
Moi, je veux me mettre à l’œuvre Cela devrait suffire pour tout combat Qu’il faille avouer le passé du Danube tout entier passé, présent et avenir Que les tendres flots viennent s’enlacer. Malgré le combat que se livrèrent nos défunts Avec le souvenir la paix saura les rejoindre arranger enfin nos affaires en commun C’est notre tâche, et non la moindre.
----------- LE LONG DU DANUBE (Traduction « Aimez-moi ») I
J’étais assis sur une pierre, en bas du quai, Je regardais les peaux de pastèques flotter. Songeant à ma vie, à peine je remarquais La surface en rumeur et le fond si muet. Comme si dans mon cœur il frayait son passage, Le Danube coulait immense, trouble et sage.
Pareil aux muscles lourds d’un homme travaillant, Soit qu’il bêche ou qu’il lime ou qu’il brasse ou qu’il forge, Chaque remous des flots, le moindre mouvement Craquait, se relâchait, tendu semblait se tordre. L’eau me berçait comme ma mère, et racontait Des histoires tout en décrassant la cité ;
Il se mit à tomber quelques gouttes de pluie Puis, comme si c’était égal, cela cessa. Mais pareil à celui qui de sa grotte épie La longue averse, mon œil allait au-delà. Comme une pluie éternelle, insensible et gris, Je voyais choir le passé, le brillant jadis.
Le Danube coulait toujours. Comme un enfant Sur le sein abondant de sa mère distraite, Les vagues s’ébattaient, s’amusaient sagement Et quelquefois semblaient me faire des risettes. Du haut du temps, c’étaient tressaillements de pierres Tombales croulant dans l’oubli du cimetière II Voilà comment je suis, il y a cent mille ans Que je regarde ce que soudain j’aperçois Une seconde ! Et j’ai là tout entier le temps Que mes cent mille aïeux contemplent avec moi.
Je vois ce qu’ils n’ont pu voir, car pour eux piocher, Mettre à mort, embrasser, créer, c’était la loi. Mais eux, plongés au sein de la matière, ils voient Ce que moi je n’aperçois pas, pour dire vrai.
Nous nous connaissons comme la joie et la peine. Le passé est à moi, le présent leur revient. Nous écrivons ces vers, et ma plume, ils la tiennent ; Je suis sensible à leur présence et me souviens… III Une mère cumane, un père mi-sicule, Mi-roumain, ou roumain peut-être tout à fait… Ma mère nourrissait mes jeunes mandibules, Mon père me faisait goûter la vérité. Lorsque moi je remue, ce sont eux qui s’embrassent, C’est cela qui parfois m’attriste et me tracasse : Tout s’écoule et je découle d’eux. « Tu verras, Me disent-ils, lorsque nous serons plus là… »
Ils me le disent car je suis eux maintenant ; Et malgré ma faiblesse, ainsi je suis puissant, Moi qui, me souvenant, me connais innombrable. Je suis mes aïeux depuis le germe initial, Je suis l’ancêtre divisé qui prolifère, Heureux je me transforme en mon père et ma mère, Et mon père et ma mère à leur tour se délient, Je suis vivante unité qu’Amour multiplie !
Je suis le monde avec ce qui fut, ce qui est, La foule des générations entrechoquées, Par moi les conquérants sont victorieux sans cesse, Et la détresse des vaincus est ma détresse, Arpad, Zalan, Verboczi, Dozsa, Turcs, Tatars, Slovaques et Roumains pêle-mêle accaparent Ce cœur, mon cœur qui déjà doit aux jours enfuis Ce doux avenir : être un Hongrois d’aujourd’hui !
Je ne veux rien que travailler. C’est une lutte Suffisante qu’il faille assumer ce passé. Les longs flots du Danube enlacent leurs volutes Qui sont à présent, passé et avenir mêlés ; Le long combat que tous mes ancêtres menèrent Dans la mémoire prend un air presque serein. Mettre un peu d’ordre enfin dans toutes nos affaires, Voilà notre travail. Au vrai, ce n’est pas rien. | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 1:02 | |
| 27’10
Je suis né en 1905, à Budapest. Je suis de confession orthodoxe. Mon père - feu Aron Jozsef - s’expatria lorsque que j’avais trois ans et la ligue de défense des enfants m’envoya à Ocsod chez des parents adoptifs. C’est la que je vécu jusqu'à l’age de sept ans. Je travaillais déjà, comme le font en général les enfants pauvres de la campagne; Je gardais les cochons. A l’age de sept ans, ma mère - feu Borbala Pozce – Me ramena à Budapest et m’inscrivit en seconde classe à l’école élémentaire. Ma mère, lavait et faisait des ménages pour m’élever mes deux sœurs et moi. Elle travaillait de porte en porte, et restait du matin au soir et moi, sans parent pour me surveiller je faisais l’école buissonnière et polissonnais. Cependant dans mon livre de lecture de troisième, je trouvais des histoires intéressante sur le roi Attila, et me jetait dans la lecture. Les contes autours du roi des Huns, ne m’intéressai pas seulement parce que je porte le même nom, Attila, mais aussi parce que mes parents adoptifs m’appelais Pista. Apres un conciliabule avec les voisins ils déclarèrent en ma présence que le nom d’Attila n’existait pas. J’en fus véritablement interdit, comme si c’etait mon existence que l’on mettait en doute. La découverte des fables sur le roi Attila, eut désormais je le crois, une influence décisive sur toute mes activités. Et enfin de compte c’est peut-être a cette expérience que je dois de mettre tourné vers la littérature, d’être devenu un homme qui pense, qui écoute l’avis des autres, mais qui s’en avise lui-même. Un homme près à répondre, quand on l’appel Pista, tant que ne s’avère ce qu’il pense lui-même, qu’il s’appèle Attila.
----------------------------------- CURRICULUM VITAE -Suite (Aimez-moi)
J’avais neuf ans quand la guerre mondiale éclata. Notre sort empirait sans cesse. Je faisais la queue devant les magasins. Parfois je prenais mon tour à l’épicerie dès neuf heures du soir et à sept heures trente du matin, quand mon tour arrivait, on me riait au nez en me disant qu’il n’y avait plus de saindoux. J’aidais ma mère comme je pouvais. Je vendais de l’eau au cinéma Vilàg. Je volais du bois et du charbon à la gare de Fenecvaros, pour nous chauffer. Je confectionnais des jouets en papier de couleur et les vendais aux enfants plus riches que moi. Je portais des paniers, des paquets aux halles, etc. Pendant l’été 1918. Je passais mes vacances à Abbazia grâce à l’Action Royale pour les Vacances des Enfants. A cette époque ma mère était déjà malade, elle avait un fibrome et je me présentai moi-même à l’Assistance Publique : c’est ainsi que je partis pour un court séjour à Monor. Revenu à Budapest, je vendis des journaux, je fis le commerce des timbres, puis des billets bleus et blancs, comme un banquier en herbe. Pendant l’occupation roumaine, je vendis du pain au café Emke. Entre-temps – après avoir terminé mes cinq classes d’école primaire – j’étais au Cours Complémentaire. A la Noël 1919 ma mère mourut et l’Office des Orphelins me choisit pour tuteur mon beau-frère, le docteur Ôdön Makai – qui vient de mourir. Pendant un printemps et un été, je travaillai à bord des péniches Vihar, Török et Tatar de la compagnie de navigation Atlantica. Puis, sans avoir fréquenté les cours, je passai l’examen de quatrième du Cours Complémentaire et je fus reçu. Après quoi mon tuteur et le Dr Sandor Giesswein m’envoyèrent au séminaire des Frères Salésiens, à Nyergesujfalu. Je n’y restai que quinze jours en tout, étant orthodoxe et non pas catholique. De là, je fus expédié à Mako, au collège Demke, où je ne tardai pas à obtenir une place gratuite. En été, j’enseignais à Mezohegyes pour le vivre et le couvert. Je terminai ma sixième classe de lycée avec la mention TB et cependant, perturbé par les conflits de puberté, j’avais tenté à plusieurs reprises de me suicider. Il est vrai que je n’avais alors, comme à l’habitude, personne auprès de moi pour me guider par ses conseils amicaux. C’est à la même époque que parurent mes premiers vers ; la revue Nyugat publia des poèmes que j’avais écrits à l’âge de dix-sept ans. On me considéra comme un enfant prodige, je n’étais pourtant qu’un orphelin. Lorsque j’eus terminé ma classe de sixième, je quittai le lycée et l’internat, où je me sentais isolé et où je n’avais pas grand-chose à faire : je n’étudiais pas, j’enregistrais ma leçon aussitôt que le professeur l’avait expliquée – mon certificat et la mention TB en font d’ailleurs foi. Je travaillai ensuite à Kiszombor comme ouvrier agricole payé à la journée, puis je fus engagé comme précepteur. Sur le conseil de deux de mes professeurs, qui avaient de l’affection pour moi, je décidai quand même de me présenter au baccalauréat. Je passai à la fois l’examen de septième et de huitième, et ainsi je terminai mes études un an plus tôt que mes anciens condisciples. Cependant je n’avais eu que trois mois pour étudier le programme : c’est pourquoi je passai brillamment l’examen de septième mais celui de huitième avec des résultats médiocres ; mon livret de baccalauréat présente heureusement de meilleures notes que celui de huitième – ce n’est qu’en hongrois et en histoire que je dus me contenter de la mention passable. C’est enfin à cette époque qu’on me poursuivit – déjà – pour avoir blasphémé le nom de Dieu dans un poème : mais la Haute Cour m’acquitta. Après avoir été quelque temps représentant en librairie à Budapest, je fus un temps, à l’époque de l’inflation, employé par la banque Mauthner. Après l’introduction du système Hintz on me mit à la comptabilité et, fort peu après, à la grande irritation de mes collègues plus âgés, je fus chargé de contrôler les valeurs qu’on avait le droit d’émettre les jours de paiement. Je dois dire que mon désir de travail fut un peu entamé par le fait que lesdits collègues se déchargeaient sur moi d’une partie de leur propre besogne – qu’il me fallait donc assumer en plus de la mienne. Par ailleurs ils ne manquaient pas de me taquiner à propos de mes poèmes qui paraissaient alors dans la presse. « Quand j’avais votre âge, moi aussi j’écrivais des vers », me lançait-on. Plus tard la banque fit faillite. Je décidai que finalement je serais écrivain, et que je tâcherais de trouver quelque occupation bourgeoise en rapport étroit avec la littérature. Je m’inscrivis à la Faculté des Lettres de Szeged pour le hongrois, le français et la philosophie ; ce qui m’imposait au total cinquante-deux heures de cours par semaine. A la fin du semestre, je passai mon premier examen avec mention TB. J’ajouterai qu’à cette époque je payais mon logement avec les honoraires de mes poèmes. J’avais été très fier que mon professeur Lajos Dézsi me jugeât apte à entreprendre des recherches conformes à mes vœux. Mais, je fus découragé définitivement lorsque le professeur Antal Horger, auprès de qui je devais passer l’examen de linguistique hongroise, me déclara devant deux témoins – aujourd’hui encore je sais leurs noms, ils sont enseignants – que, lui vivant, je ne deviendrais jamais professeur de lycée. « Car, me dit-il en me mettant sous le nez une exemplaire du journal Szeged, à un homme qui écrit de telles choses, nous ne saurions confier l’éducation des générations futures. » On parle souvent de l’ironie du sort et c’en fut vraiment une, car le poème incriminé, « Cœur pur », devint vite célèbre et ne recueillit pas moins de sept articles dans la presse. Lajos Hatvany a déclaré à plusieurs reprises – « pour l’instruction des temps à venir » - que ce poème représentait selon lui le témoignage par excellence de toute la génération de l’après-guerre. Ignotus, lui, « caressait, dorlotait, berçait, murmurait ce merveilleux poème », ainsi qu’il l’écrivit dans la revue Nyugat ; et dans son Art poétique, il le donna comme modèle de la poésie nouvelle. L’année suivante – j’avais alors vingt ans – je me rendis à Vienne et m’inscrivis à l’Université. Pour vivre, je vendais des journaux à l’entrée du Rathaus-Keller, je faisais le ménage dans les locaux de l’académie Hongroise de Vienne. Lorsqu’il l’apprit, le directeur, Antal Laban, voulut faire cesser cela. Il me fit donner des repas au Collegium Hungaricum et me procura des élèves : les deux fils du directeur général de la Banque Anglo-Autrichienne, Zoltan Hajdu. De Vienne où je campais dans la misère (je n’avais pas couché dans des draps depuis quatre mois), je devins sans transition l’hôte du château des Hatvany, à Hatvan ; puis la maîtresse de maison, Mme Albert Hirsch, m’ayant fourni les fonds nécessaires, je partis pour Paris à la fin de l’été. Et là je m’inscrivis à la Sorbonne. Je passai l’été suivant dans le Midi de la France, sur la côte, dans un village de pêcheurs. Après quoi je m’en suis retourné à Pest. J’ai suivi pendant deux semestres les cours de la Faculté de Budapest ; je me gardais pourtant de me présenter à mes examens de professorat car, évoquant la menace d’Antal Horger, j’étais persuadé que de toute façon je n’obtiendrais aucun poste. L’institut du Commerce Extérieur m’a employé ensuite, dès sa création, à des travaux de correspondance en hongrois et en français. L’ancien directeur général de cet établissement, M.Sandor Korodi, est prêt, je crois, à fournir des références à mon sujet. A cette époque cependant le sort me frappa si inopinément que, tout endurci que je fusse, j’eus quelque peine à supporter cette nouvelle infortune. On m’envoya d’abord dans un sanatorium, puis on me mit en congé de maladie, pour cause de neurasthénie. Je quittai donc mon bureau, comprenant que je ne pouvais rester à la charge d’une institution aussi jeune. Depuis, je vis de ce que j’écris. Je suis rédacteur de la revue littéraire et critique Szép Szo. En dehors de ma langue maternelle, le hongrois, j’écris et je lis le français et l’allemand, je peux correspondre en hongrois et en français, je tape parfaitement à la machine. J’ai appris également la sténographie : un mois d’exercice suffirait à rafraîchir mes connaissances. J’ai quelques compétences en matière d’imprimerie de presse. Je sais composer selon les règles. Je me considère enfin comme un homme d’honneur, doué au surplus d’une intelligence rapide et capable d’endurance au travail.
ATTILA JOZSEF | |
| | | Polip
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| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 1:10 | |
| ELEGIE
Comme la fumée, qu’un ciel de plomb rabat, Au paysage morne étend sa lourde nappe, Mon âme flotte A ras de terre, Flotte et ne bouge pas.
Penchez-vous, toi, mon âme rude, et toi, ma douce Imagination, abaissez vos regards Sur les traces dures de la réalité, Sur vous, sur vos origines, C’est ici. Sous un cil qui pourrait être fluide, Dans une solitude de grands murs déserts, Le silence étouffant de la misère, Parfois menace, parfois prière, Délaie lentement la pâte du chagrin Dans le cœur de ceux qui rêvent Et puis la mêle A la peine de millions d’êtres.
Tout l’univers des hommes Ici se prépare. Ici, tout est ruines. Un pissenlit raide ouvre son ombrelle Dans la cour de l’usine abandonnée. Sur un escalier d’étroites fenêtres Aux vitres cassées, les jours vont glissant Jusqu’à des moiteurs obscures.
Réponds. Es-tu d’ici ? D’ici tellement que jamais ne te lâche Le désir grave D’être pareil à tous les autres misérables, Ceux-là qui sont la chair de cette grande époque, Ceux-là dont le visage est abîmé ?
C’est ici, tu es là, là où l’ordre moral Vorace, à l’abri de palissades qui boitent, Se protège, se défend En glapissant. Te reconnais-tu ? Là, les âmes sont vidées, Attendant l’avenir, un futur bien planté, Pareilles aux terrains vagues d’alentour, Qui pensivement, tristement, Restent là, rêvant d’énormes bâtisses, Pleins de bruits alertes qui se tissent. Avec leurs yeux glauques de tessons de bouteilles, Epars dans la boue sèche, Ils ne voient qu’une herbe chétive.
Une poignée de sable quelquefois s’y éparpille Et tourbillonne… Et parfois bleue ou verte ou noire, Venant d’ailleurs où la pâture est abondante, Une mouche s’y égare. Elle y zigzague, elle y bourdonne, Alléchée par les détritus humains, Par de vagues guenilles. La terre nourricière, Epuisée par le profit, A sa façon parfois de mettre le couvert : Une herbe jaune s’épanouit Dans un pot de fer.
Peux-tu savoir Quelle aride joie au fond de moi-même M’y pousse et m’y ramène, pourquoi Ce paysage me captive et quelle Souffrance riche me rive à lui ? Pareil à un enfant qui revient vers sa mère, Quand on l’a battu chez les autres, malmené, En vérité, c’est ici seulement Que tu peux sourire ou pleurer. Ici seulement tu peux être toi-même Pleinement, ô mon âme. Voici ma patrie. | |
| | | Polip
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| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 1:17 | |
| Depuis la terre, l’aube délie le ciel. A son appel tendre et pur, Les fourmis et les enfants S’égrainent au monde du jour. En l’air, nulle buée Une brillante légèreté, docile, oscille… Pendant la nuit, sur les arbres se sont perchées, Comme papillons, les feuilles.
Dans mes rêves, je vis des tableaux barbouillés De rouge, jaune et bleu. Et je sentis que c’était l’ordre. Un grain de poussière volant ne m’étourdit guère. Dans mes membres à présent, mon rêve prend son essor Comme une obscurité montante, Et l’ordre, et le monde de fer. Le jour, une lune se lève en moi. Et si dehors, se trouve la nuit, un soleil brille à l’intérieur.
Je suis bien maigre : je ne mange que du pain. Parfois, parmi les esprits loquaces et légers, Gracieusement, je cherche ce qui serait enfin plus certain que les dés. Pas de côte tendre qui se frotte contre mes lèvres, Ni d’enfant contre mon cœur. Il peut ruser, Le chat n’aura guère deux souris à la fois Au dehors et à l’intérieur.
Tout comme un tas de bois coupé, Le monde gît sans dessus dessous, Serré, pressé et enlacé. L’un est contre l’autre et du coup, Tous sont déterminés Seul a son buisson, ce qui n’est point, Seul, ce qui sera, est fleur. Mais ce qui est, part en morceaux.
A la gare de marchandises, je me blottis au pied d’un arbre. Comme un bout de silence, une ivraie grise Effleura mes lèvres d’une douceur abrupte et âpre. Mort, j’épie le gardien, ce qu’il ressent. Et sur les wagons taciturnes, Son ombre entêtée qui fond Sur le charbon luisant, Frais de rosée.
Du fond du soir, j’ai levé les yeux Vers le rouet denté des cieux. Avec des fils de hasard spéculaires Le métier du passé tissa la loi séculaire. J’ai relevé les yeux à nouveau vers le ciel, Du fond des brumes de mes rêves épars, Et je vis que la texture de la loi Se défait toujours quelque part.
Voici la souffrance au-dedans. Mais son explication reste dehors. Ta plaie : le monde, est toujours plus ardent. Et tu ressens ton âme, fièvre, déclore… Captif, tu demeures. Et tu ne saurais t’affranchir que si pour ton confort, Tu n’élèves point de maison, de château fort Où le maître se mue en propriétaire.
Le silence dressa l’oreille : il sonna un coup. Tu pourrais revoir ta jeunesse, au milieu d’humides murs cimentés. Tu peux t’imaginer un brin de liberté, Pensai-je. Et voilà qu’au moment de me lever, Des astres, des chariots nocturnes, Brillent comme autant de barreaux serrés, Sur la cellule taciturne.
J’entendis le fer pleurer. J’entendis rire la pluie. Je vis, le passé se fendit. Seul, le figuré peut s’oublier. Et je ne suis jamais qu’aimer. Ployé sous mes fardeaux en souffrance, A quoi bon se forger une âme mordorée avec toi ? Or pur de la conscience !
Est homme fait, qui, En son cœur, n’a ni mère ni père, Et sait qu’il n’a la vie qu’en sus de la mort ; Et la rend comme un objet trouvé, N’importe quand. Pour cela même, il la garde bien ; Qui n’est ni Dieu ni prêtre, Ni pour lui-même ni pour son prochain.
Moi, je vis le bonheur Il fut tendre, blond et de trois centaines de livres. Sur la pelouse sévère de la cour Se dandinait, frisé, son sourire. Il se vautra dans une douce flaque tiède d’émoi, Papillonna et grogna encore vers moi. Je vois encore comment la lumière tâtonna, Dans son duvet, hésitant.
J’habite près du chemin de fer. Par ici, bien des trains vont et viennent. Et de temps à autres, je regarde les fenêtres lumineuses Planer dans l’obscurité ouatée. Ainsi, les jours illuminés qui s’enchevêtrent Filent dans l’obscurité sans fin à jamais. Et je suis là, dans chaque lueur de fenêtre. Je m’y accoude… et je me tais.
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EVEIL (Traduction « Aimez-moi »)
Du sol, le ciel s’est écarté Et l’aube à la parole pure Fait rouler dans cette clarté Des essaims de progéniture ; Limpidité, l’air est sans brume, Y flotte la légèreté ! La nuit, des papillons feuillus Se sont sur les branches plantés.
J’ai rêvé quelques brouillons peints En rouge, bleu, jaune abricot : J’y voyais l’Ordre même – et rien, Pas un grain n’y faisait défaut. Ces images sombraient trop tôt – Mais malgré notre ordre d’airain, De nuit, mon soleil brille en haut, Et ma lune, au jour, ne s’éteint.
Je suis bien maigre : un peu de pain, Voilà ma pitance ; entouré D’âmes déchues, sans un rotin, Je cherche plus sûr que les dés. Je ne jouis pas des baisers Ni d’un rôti ni d’un enfant – Nul chat ne saura attraper La souris dehors et dedans.
Le monde où tout se superpose Est comme du bois entassé Dont les bûches, effets et causes, Se tiennent serrées et pressées, Les voici donc déterminées ! Du seul néant pousse la rose, Fleurira seul qui n’est pas né ; Tout ce qui est se décompose.
A la gare de marchandises Je gis sous un arbre, hors de vue, Tel le silence ; une herbe grise Frôle ma bouche – douceur crue ! L’air d’un mort, j’épie le gardien : Au milieu des wagons son ombre Fait un fantasque va-et-vient Sur le charbon humide et sombre.
A l’intérieur est la souffrance, Mais au dehors est sa raison. Ta blessure est ce monde ardent, Mais l’âme en fièvre ta lésion. Le rebelle reste en prison – La liberté vient seulement Si tu bâtis une maison Sans propriétaire dedans.
J’ai regardé du fond du soir Les roues dentées du firmament – Des fils scintillants du hasard Y fut tissée la loi du temps ! Du fond de mes rêves déments J’ai coulé un nouveau regard Et vu que ledit tissu tend A crever toujours quelque part.
Silence au guet – une heure tinte. Rentre à tes débuts, rentre aux gris Murs moites en ciment qui suintent, Et t’imagine libre, ami, Me dis-je. Et me dressant debout, Je vis qu’au ciel, dessus ma tête, Le Grand Chariot brillait, verrou D’une vaste prison muette.
J’ai entendu le fer pleurer, J’ai entendu rire la pluie, J’ai vu se fendre le passé, Tous les faux-semblants qu’on oublie ; Rien entreprendre, sauf aimer – O pourquoi, conscience qui luis, Dois-tu être en arme forgée ?
Est adulte seul celui qui N’a dans le cœur aucun parent Et sait qu’il doit rendre sa vie A la mort, simple supplément, Comme un objet trouvé se rend ; Celui qui jamais n’officie, Qui n’est dieu ou révérend Ni de lui-même ni d’autrui.
Le grand bonheur, le bonheur doux, Pesant deux quintaux, je l’ai vu. Sur l’herbe austère de la cour Tanguait son sourire crépu. Dans la flaque tiède étendu Il grogna vers moi, et le jour Caressait, hésitant, ses rudes Soies blondes – je le vois toujours.
C’est tout près des rails que j’habite, Près du va-et-vient permanent Des vitres de ces trains en fuite Dans le vent nocturne ondoyant. Dans la nuit éternellement, Foncent les jours qui se font suite. Dans chacun des compartiments C’est moi qui m’accoude et médite. | |
| | | Polip
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| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 1:21 | |
| SUICIDE ?
J’avais neuf ans. Maman partait tôt au travail et rentrait tard. Mon père avait émigré deux ans auparavant. Nous menions une vie de pauvres gens dans un logement d’une pièce-cuisine – mais, bien entendu, je ne souffrais pas de notre pauvreté. J’étais heureux de pouvoir marcher pieds nus du printemps à l’automne et, lorsque je volais du combustible à la gare de Ferencvaros, j’avais une conscience de héros. Certes, je n’aimais pas qu’on m’attrape ni qu’on me batte, mais sans ces risques, je n’aurais pas été un vrai héros. « Coincé », je me mettais à pleurer, et, invoquant une pauvreté que je mesurais mal, donc « mentant vrai », je parvenais à attendrir les stupides adultes, et à profiter de leur confusion pour prendre la clé des champs. Sinon je ne pleurais que rarement : le soir lorsque j’étais obligé de me laver les pieds. De toute façon, j’étais le seul homme de la maison, la « peste » pour mes deux sœurs aînées, mais, le dimanche après-midi, le chouchou de ma Maman. Un jour, Maman étant toujours au travail, je n’avais pu aller traîner par les rues. Je ne me souviens plus pourquoi ; peut-être parce que l’hiver approchait et que je n’avais pas de chaussures. Je restai donc à la maison, et chipai une cigarette dans le sac d’une de mes sœurs –déjà fiancée-, mais au lieu de me retirer dans les cabinets pour fumer (c’est le seul endroit où un enfant pauvre puisse faire ce qu’il veut), j’allumai la cigarette dans la cuisine. C’était bien entendu, un acte de révolte. Pourquoi une chose qui était permise à Jolan m’était-elle interdite à moi ? Alors que c’est toujours moi qui faisais les commissions, moi qui allais chercher du bois dans la forêt, et pas elle ! (Dans ces moments de révolte, je m’arrangeais toujours pour mettre en valeur, à mes propres yeux, la vertu sociale de certains de mes actes, que pourtant j’accomplissais très volontiers et que j’aurais accomplis même si on me les avais interdits.) Eh bien, vous allez voir ce que vous allez voir ! Je fumais donc, mais avec une certaine prudence, dans un des coins de la cuisine. Jolan cependant, ayant reniflé l’odeur de la fumée, vint me chercher derrière le fourneau et me donna une bonne paire de gifles. Alors, non pas tant à cause de la douleur physique (que j’ai bel et bien oubliée) qu’indigné par une violence qui portait atteinte à mes droits les plus sacrés, je me suis mis à hurler et à trépigner. Jolan, ne supportant pas cette scène, quitta la maison. Peut-être avait-elle à faire… Après son départ, je m’assis dans un coin de la cuisine pour mijoter une vengeance à la mesure de mon impuissance. « Salut ! » me jeta ma sœur Etus revenue avec l’une de ses amies. « Salut ! » répondis-je du bout des lèvres. Les deux filles se retirèrent dans l’autre pièce. (Je crois qu’elles se disaient la bonne aventure.) Et moi je décidai de boire de la soude caustique ! Toujours blotti dans mon coin, la respiration encore entrecoupée de sanglots, je me délectais à l’idée de mourir. Je me représentais les autres en larmes et me regrettant. Ils comprendraient alors – mais trop tard – qui j’étais ! Quant à ce chameau de Jolan, elle irait elle-même faire les commissions désormais. A moins qu’on y envoie Etus. D’ailleurs, le soir, en apprenant pourquoi j’étais mort, Maman assommerait Jolan. Arrivé à ce point, je me mis à pleurer. Je pleurais comme quelqu’un que la mort d’un être cher affecte profondément. Je commençais à plaindre la pauvre Maman ; qu’allait-elle faire une fois que l’irrémédiable se serait produit ? Mais tant pis pour elle, ajoutai-je, tout ce qui arrive est sa faute. C’est elle qui commande, c’est elle qui est responsable de la mort d’un petit garçon aussi gentil, aussi intelligent, aussi courageux, aussi talentueux… Je me levai, assombri, et allai chercher la soude sur les étagères – on la gardait dans un épais bol marron. Or, le bol ne contenait rien, sinon un peu d’eau au fond. Je m’immobilisai, toujours aussi sombre. Tout à coup les paroles de Maman me revinrent à l’esprit : « Va me chercher de la soude pour cinq sous, de l’empois pour huit sous et du bleu pour quatre sous ! » Soude, empois, bleu – les trois choses allaient sans doute ensemble. Après quelques instants je finis par trouver une demi-tablette d’empois que je mis dans le bol à soude caustique et fis dissoudre dans l’eau. (Pourquoi mon choix n’était-il pas tombé sur le bleu ? Je l’ignore encore.) Pui (on tombe par terre, quand on meurt) je « m’effondrai », non sans avoir posé habilement le bol sur le tabouret. Je poussai un soupir. J’avais affreusement peur. A force de déglutir je fis venir un peu d’écume sur mes lèvres. Malgré ma terreur je ne pensais qu’au spectacle que j’offrirais tout à l’heure ; ce spectacle serait d’autant plus effrayant que l’écume sur mes lèvres serait plus fournie. Aussi me concentrai-je de façon de produire le plus d’écume possible, tout en tremblant de tout mon corps. Je me souviens de mes mouvements convulsifs ; j’étais persuadé que j’allais mourir. Je ressentais une immense tristesse et j’en serais venu à regretter mon acte, si je n’avais pas été dépité de constater que personne ne s’intéressait à mon « agonie ». La colère montait en moi ; elle se dirigeait cette fois conte Etus qui, sans se douter de rien, s’amusait tranquille avec son amie. Je poussai quelques gémissements, me mis à gratter le carrelage de la cuisine des pieds et des mains comme torturé par des crampes. Et je me prenais tellement au jeu que je ressentais effectivement des crampes ; mais ces crampes n’étaient dues qu’à ma volonté convulsive de me faire remarquer. En vain. J’étais couché sur le dos, la tête dirigée vers la porte de la cuisine, les pieds vers la porte de la chambre, follement désireux de voir quelqu’un entrer. Ayant d’ailleurs compris qu’on pouvait entrer sans me remarquer, je me traînai jusqu’à la porte de la chambre, que je finis par toucher du pied. Alors, légèrement soulagé de ma colère, mais toujours avec une infinie tristesse, je continuai mon manège. Etus finit par s’apercevoir que je faisais du bruit près de la porte, car elle me dit : « T’as pas fini, non ? mais au bout de quelques instants, après s’être écriée : « Es-tu devenu fou, Attila ? » elle perdit patience et entra dans la cuisine. Apercevant alors dans la pénombre mon visage gonflé de pleurs, mes traits altérés par la tristesse et le désespoir, elle poussa un cri de terreur. Ce qui eut pour effet de décupler mon propre effroi. Je me mis donc à pleurer de plus belle, tout en bredouillant : « Mon Dieu, Etus, je vais mourir, j’ai bu de la soude caustique ! » (J’avais oublié que j’avais bu de l’empois.) Etus alla chercher la concierge qui me coucha dans le lit. La petite pièce ne tarda pas à se remplir de petites vieilles ne s’occupant plus du tout de moi et se lamentaient au sujet du prix des pommes de terre, mais je ne m’en sentais nullement offensé. Etus prévint Maman, laquelle, quittant son travail, rentra précipitamment, et, repoussant tout le monde, se pencha sur mon lit. Ses lèvres tremblaient, ses yeux étaient en pleurs. Puis, me prenant dans ses bras (j’avais neuf ans !), elle se mit à me caresser et me porta à la cuisine. Là, tout bas, presque en chuchotant, elle me demanda : « Montre-moi, mon petit, ce que tu as bu. » J’étais si heureux d’être dans les bras de Maman que j’en oubliai toute ma rancœur. Je me blottis contre elle et me remis à pleurer, car je songeais que pour être complètement heureux, il aurait fallu que Maman me prenne dans ses bras et me caresse sans que j’eusse fait ce que j’avais fait. Puis, je montrai l’empois et dis : « Ca ! » Maman poussa un soupir de soulagement et je me sentis moi-même soulagé de mon fardeau intérieur. Je ne pensais plus à rien, je ne voyais plus que Maman me ramenant dans la chambre, me recouchant, me recouvrant. Elle y resta un peu, me dit quelques mots à voix basse, je ne me souviens plus quoi, mais c’était très beau. Puis elle retourna à la cuisine, envoya Etus chercher de la tisane pour moi, alluma le fourneau, remplit d’eau une marmite, la posa sur le feu (j’entends encore le bruit que cela faisait) – et je m’endormis. | |
| | | Polip
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| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 1:26 | |
| COMPLAINTE TARDIVE
Trente-six degrés de fièvre à peine… et vois : je brûle Sans tes doux soins, maman ! Ainsi qu’on fait des filles sans scrupules, La mort t’a étendue contre son flanc. D’un doux automne et de femmes chéries Je tâche, maman, de te recréer, Mais on n’échappe pas au temps qui fuit : Je brûle… un vrai brasier !
J’ai fui, gamin, en province : on était à bout - c’était à l’après-guerre -, Budapest était sens dessus dessous Et même du pain on n’en trouvait guère. Sur un wagon, à plat ventre couché, Je t’apportais des vivres, fils têtu : Du millet blanc, voire un poulet entier… Et toi, tu n’étais plus !
Tu as abandonné aux vers tes doux tétons ! Tu m’as échappé, mère ! Tes réprimandes, tes consolations Si chères se révélaient mensongères : « Mange, c’est pour moi que tu grandiras ! » Tu soufflais sur mon potage brûlant… Las, tu ne mords plus que le gazon ras… Tu m’as trahi, maman !
J’aurai dû te manger toi… non pas ton dîner ! Qu’ai-je demandé, moi ? Pourquoi avoir tant lavé, dos courbé ? Pour au fond du trou reposer bien droit !... Ah, si tu pouvais encor me rosser ! Je regimberais, pris d’un bonheur fou… Méchante, tu feins de non-exister ! Ombre, tu gâches tout !
Tu es plus gredine, oui, que ces femmes qui Nous mènent par le nez ! Tu as de tes amours, en fraude, omis Ta foi vivante en des cris enfantée ! Tsigane !... cajoleuse !... tous les dons, Tu les reprends à l’heure funéraire ! Ma bouche pour toi crache ces jurons : M’entends-tu ? Fais-moi taire !
Je m’égare… A nouveau mon fol esprit s’éclaire… La légende est passée… L’enfant à jamais épris des sa mère Reconnaît d’avoir été insensé. Toujours nous serons fils insatisfaits, Même en leurrant les autres on se leurre : Qu’on lutte ou bien qu’on choisisse la paix, Il faut bien que l’on meure…
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KÉSEI SIRATÓ Harminchat fokos lázban égek mindig s te nem ápolsz, anyám. Mint lenge, könnyü lány, ha odaintik, kinyujtóztál a halál oldalán. Lágy őszi tájból és sok kedves nőből próbállak összeállitani téged; de nem futja, már látom, az időből, a tömény tűz eléget. Utoljára Szabadszállásra mentem, a hadak vége volt s ez összekuszálódott Budapesten kenyér nélkül, üresen állt a bolt. A vonattetőn hasaltam keresztben, hoztam krumplit; a zsákban köles volt már; neked, én konok, csirkét is szereztem s te már seholse voltál.
Tőlem elvetted, kukacoknak adtad édes emlőd s magad. Vigasztaltad fiad és pirongattad s lám, csalárd, hazug volt kedves szavad. Levesem hütötted, fujtad, kavartad, mondtad: Egyél, nekem nőssz nagyra, szentem! Most zsiros nyirkot kóstol üres ajkad - félrevezettél engem.
Ettelek volna meg!... Te vacsorádat hoztad el - kértem én? Mért görbitetted mosásnak a hátad? Hogy egyengesd egy láda fenekén? Lásd, örülnék, ha megvernél még egyszer! Boldoggá tenne most, mert visszavágnék: haszontalan vagy! nem-lenni igyekszel s mindent elrontsz, te árnyék!
Nagyobb szélhámos vagy, mint bármelyik nő, ki csal és hiteget! Suttyomban elhagytad szerelmeidből jajongva szült, eleven hitedet. Cigány vagy! Amit adtál hizelegve, mind visszaloptad az utolsó órán! A gyereknek kél káromkodni kedve - nem hallod, mama? Szólj rám!
Világosodik lassacskán az elmém, a legenda oda. A gyermek, aki csügg anyja szerelmén, észreveszi, hogy milyen ostoba. Kit anya szült, az mind csalódik végül, vagy így, vagy úgy, hogy maga próbál csalni. Ha kűzd, hát abba, ha pedig kibékül, ebbe fog belehalni.
1935 / 1936. december
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| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 1:28 | |
| MAMAN
Maman depuis huit jours déjà M’arrête en songe à chaque pas. Je vois le linge et le panier Montant, grinçant vers le grenier.
J’étais un être fruste encor Et piaffant dur et criant fort. J’emplissais de moi ses oreilles : « Moi, je veux être la corbeille ! »
Mais que je pleure ou que je crie, Mot, ni regard, ni gronderie : La corbeille et le linge ailé, Luisants, sans moi, s’en sont allés.
Je me tairai : il est trop tard. Gigantesque dans mon regard, Cheveux gris en haut du ciel pur, Elle met au bleu tout l’azur. | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 1:43 | |
| Qu’un insecte rampe sur ton œil ouvert. Qu’une verdâtre moisissure de velours barde ta poitrine ; Noie ton regard dans la solitude où tu m’expédies ; Broie tes dents, dévore ta langue !
Qu’en sable sec, ton visage s’effrite. Le charmant. Et si tu me cajolais beaucoup ; Puisqu’en guise de giron, tu gardes un pur vide. Que l’ivraie lie à jamais tes doigts industrieux ! -------------------------------- SOLITUDE (Traduction "Aimez-moi")
Que tes grands yeux soient piétinés par la vermine. Tes seins, un vert velours moisi les prend. Epie l’isolement vers quoi tu m’achemines, Avale ta langue et mâche tes dents !
Que, sable sec, s’effrite et se nie ton visage. Si tu avais des caresses pour moi, Ton giron ne gardant même pas un nuage, Qu’un vieux chiendent te retienne les doigts !
Voilà, tu n’es plus rien que cet affreux désir… Tu ne broncherais pas si des passants Venaient à t’entourer, et muets, s’enquérir De ce qui m’a rendu aussi méchant…
Qui donc étreins-tu ? Que ton fils, sitôt venu, A tourner comme toupie se distraie, Tu lui jettes, cernée d’alligators repus, De ton haut un regard crispé, mauvais.
Allongé sur le dos, immobile je vois Mes yeux ; c’est avec eux que tu m’observes. Meurs donc ! Avec tant de désir je m’y emploie, Que de mourir ainsi je me réserve. | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 2:05 | |
| TISZTA SZÍVVEL
Nincsen apám, se anyám, se istenem, se hazám, se bölcsőm, se szemfedőm, se csókom, se szeretőm.
Harmadnapja nem eszek, se sokat, se keveset. Húsz esztendőm hatalom, húsz esztendőm eladom.
Hogyha nem kell senkinek, hát az ördög veszi meg. Tiszta szívvel betörök, ha kell, embert is ölök.
Elfognak és felkötnek, áldott földdel elfödnek s halált hozó fű terem gyönyörűszép szívemen.
PAS DE PERE
Je n’ai ni père ni mère, Ni berceau ni suaire, Ni Dieu ni patrie, Ni baiser ni bonne amie.
Trois jours, que je ne mange Ni plus ni moins qu’un ange. Le pouvoir de mes vingt ans ; Et mes vingt ans, je les vends.
Si personne ne l’accepte : Le diable en personne l’achète. A cœur pur, je force les portes, S’il le faut, c’est la mort que j’apporte.
On m’arrête et on me pend, En terre bénie on m’attend. Et des herbes de mort maléfiques Poussent sur mon cœur magnifique. ------------- CŒUR PUR (Traduction « Aimez-moi »)
Je n’ai ni père ni mère, Rien que je rêve ou j’espère, Je n’ai ni Dieu ni patrie, Berceau, cercueil, tendre amie.
De trois jours, pas un repas : Oui, ce qui s’appelle pas. Ma puissance, c’est vingt ans : Ma puissance, je la vends.
Et pour peu que nul n’en veuille, Que le diable, lui, l’accueille ! Je volerai, l’âme pure, Te tuerai, je vous assure.
Mais qu’on m’arrête et me pende Et qu’à la terre on me rende, Maléfique et sûre, une herbe Sourdra de mon cœur superbe. | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 2:14 | |
| POUR MON ANNIVERSAIRE / SZÜLETÉSNAPOMRA
Harminckét éves lettem én - meglepetés e költemény csecse becse:
Voilà que j’ai trente-deux ans. Ce poème est un compliment, Quel beau cadeau Cadeau !
ajándék, mellyel meglepem e kávéházi szegleten magam magam.
Dans un café, à une table, Je me surprends du remarquable, Présent Présent !
Harminckét évem elszelelt s még havi kétszáz sose telt. Az ám, Hazám!
Trente-deux ans derrière moi, Mais pas deux cent pengoes par mois, Hongrie Chérie !
Lehettem volna oktató, nem ily töltőtoll koptató szegény legény.
J’aurais pu être pédago Au lieu d’user tant de stylos, En mec A sec !
De nem lettem, mert Szegeden eltanácsolt az egyetem fura ura.
Mais non, à Szeged, de la fac, Me fit éjecter une attaque, D’un gars Gaga !
Intelme gyorsan, nyersen ért a „Nincsen apám” versemért, a hont kivont
Pour mon poème « pas de père », Déchaina sur moi sa colère, L’épée Levée !
szablyával óvta ellenem. Ideidézi szellemem hevét s nevét:
Au nom de la patrie, de Dieu, Il pesta contre moi, ce vieux, Jésuite Je cite :
„Ön, amig szóból értek én, nem lesz tanár e féltekén” - gagyog s ragyog.
Jamais, ma parole d’honneur, Vous ne deviendrez professeur ! Et l’homme Rayonne !
Ha örül Horger Antal úr, hogy költőnk nem nyelvtant tanul, sekély e kéj -
Est-ce une joie, Antal Horger, Que je renonce à la grammaire ? Voyons Mon bon !
Én egész népemet fogom nem középiskolás fokon taní- tani!
Le peuple entier, toute la masse, Suivra, pas sur tes bancs de glace, Toujours Mes cours !
..................... POUR MON ANNIVERSAIRE (Traduction « Aimez-moi »)
Aujourd’hui j’ai trente-deux ans. Je me fais un cadeau plaisant, Je m’autorise Une surprise.
C’est au café sur une table Que sera fait se don notable, Petit poème Fait pour moi-même.
Trente-deux ans derrière moi Mais pas deux cents pengoes par mois, C’est mon état Dans cet état.
C’eût été bien : prof de philo, Au lieu d’user tant de stylos. Pas de fromage, C’est bien dommage.
A Szeged, de la Faculté Drôlement je fus éjecté Par des messieurs Très sérieux.
C’était mon poème Cœur pur Qui me valait ce coup si dur : Levant l’épée De l’épopée,
Invoquant Dieu et la Patrie, Devant moi c’étaient des furies. J’entends toujours Leurs beaux discours :
« Moi vivant, vous ne pourrez pas Etre professeur ici-bas ! » Qu’ils ont henni, Ces culs-bénits !
Tu jubilais, Antal Horger, Que le poète eût son congé : Chacun sa joie, Chacun sa voie…
Diplôme ou pas de licencié, J’enseignerai au peuple entier. Tous les degrés Sans votre gré !
Dernière édition par le Sam 14 Oct - 2:24, édité 1 fois | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 2:21 | |
| POSE TA MAIN
Là, sur mon front, Pose ta main. Sois comme si C’était ma main.
Prête à tuer, Veille sur moi. Sois comme si C’était sur toi.
Et aime-moi Dans le bonheur : Comme si toi C’était mon cœur.
Tedd a kezed homlokomra, mintha kezed kezem volna.
Úgy õrizz, mint ki gyilkolna, mintha éltem élted volna.
Úgy szeress, mint ha jó volna, mintha szívem szíved volna.
Dernière édition par le Sam 14 Oct - 2:32, édité 1 fois | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 2:22 | |
| DEPUIS TON DEPART
Depuis ton départ, tout s’est refroidi, Le baquet, et le lait, de la hache le manche, Chutes étouffées de bûches qu’on tranche, Aussitôt figées, blanches et transies.
Sur le sol sourd, par à-coups, la rafale Aux mains nerveuses, tâtonnant, s’habille. De sa poitrine tombent les brindilles, Des feuilles en furies s’affalent.
Déjà, je me croyais dans le val si douillet de tes seins… Deux remparts : l’un au Sud, l’autre au Nord. Je croyais que le soir scintillait à mes pieds, Et que mes cheveux engendraient l’aurore.
Je suis maigre et je te contemple, assis. Mauvaise herbe fleurie, monde lointain. Dans tes pétales bleus, le ciel s’éteint. La grande obscurité lentement m’envahit. ------------------------- DEPUIS QUE TU ES PARTIE (Traduction « Aimez-moi »)
C’est depuis que tu es partie que sont plus froids, Ici, le seau, le lait, le manche de la hache, Et que le bois fendu s’affaisse et se détache. Vois-le tomber, livide et tout roide à la fois !
Sur le sol sourd, le vent dans ses habits s’engage. Il recherche sa proie, s’arrête, fouille et tranche, Et son tourbillon précipite les branches. Frêle, la feuille alors bronche et tombe avec rage.
Moi, dans un doux vallon déjà je me croyais… L’aube neuve épousait mes cheveux qui ondulent, La plante de mes pieds brillait au crépuscule, Et du Nord et du Sud tes seins me protégeaient.
Je suis assis, chétif… toi t’épanouissant, Monde lointain, fleur de chiendent… Je te regarde. Dans ton cœur bleu un ciel de cendre se hasarde ; Moi langé par le soir qui tombe immensément… | |
| | | Polip
Nombre de messages : 24 Date d'inscription : 14/10/2006
| Sujet: Re: ce n est pas moi qui clame (par tof) Sam 14 Oct - 2:26 | |
| Me faut-il être juste ? On m’étendra toujours ! Me faut-il être injuste ? On m’étendra toujours ! ---------------- DEUX HEXAMETRES (Traduction «Aimez-moi »)
Etre honnête, à quoi bon, si de toute façon Un cercueil nous attend ! Malhonnête ? A quoi bon, si de toute façon Un cercueil nous attend !
Dernière édition par le Sam 14 Oct - 2:39, édité 1 fois | |
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| | | | ce n est pas moi qui clame (par tof) | |
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